Les pierres mouvantes : vallée morte et forces de glace

Les pierres mouvantes de la vallée de la mort. Par Dreamliner, Usage non commercial, DMCA / https://wall.alphacoders.com/big.php?i=596104&lang=French Par Dreamliner. Usage non commercial, DMCA / https://wall.alphacoders.com/big.php?i=596104&lang=French

Avec le record de chaleur enregistré sur la surface terrestre le 10 juillet 1913 (56,7 °C !), la Vallée de la Mort, située aux États-Unis à la frontière entre le Nevada et la Californie, semble bien porter son nom. Parmi ses nombreux sites d’intérêt, le Racetrack Playa est le théâtre d’un phénomène curieux : des pierres, parfois lourdes de plus de trois cents kilogrammes, semblent s’y déplacer à l’abri des regards, comme en témoignent les longues traînées de plusieurs mètres qui leur sont rattachées. De quoi intriguer les scientifiques depuis les années 1940… 

En 2011, deux cousins chercheurs, Richard D. et James M. Norris, ont tenté à leur tour de percer ce secret. Ils ont placé, parmi les autres, des roches identiques à celles de la Vallée (les roches originelles étant protégées) et les ont équipées de balises GPS spéciales, conçues pour se déclencher en cas de mouvement.

Fin décembre 2013, les deux chercheurs sont partis en expédition sur place, pour collecter les données et recharger les batteries des instruments. Ils pensaient attendre des années avant d’obtenir des résultats mais, un beau matin, ils se sont arrêtés net quand ils ont entendu de la glace se craqueler. Ils ont donc décidé de réaliser une prise de vue en time-lapse (sur une longue durée, puis accélérée au montage), et ont pu observer ce que personne n’avait pu voir jusque-là : les pierres bougent.


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Grâce aux données vidéo, météorologiques et GPS collectées par les deux chercheurs, le phénomène a enfin pu être compris. Après de fortes pluies, les eaux saturent le sol de telle sorte qu’une fine couche aqueuse de quelques millimètres se forme à sa surface. La nuit, cette eau gèle, puis se fragmente en fin de matinée quand l’air se réchauffe. Sous l’effet des vents, ces plaques de glace peuvent alors pousser les roches lentement et par à-coups.

Richard D. et James M. Norris ont eu énormément de chance : ce phénomène peut se produire une fois toutes les quelques années, voire décennies. D’autant plus quand on sait qu’il est de moins en moins fréquent depuis les années 1970, vraisemblablement à cause du réchauffement climatique.

Sylvain Roy


Source :

Norris RD, Norris JM, Lorenz RD, Ray J, Jackson B (2014) Sliding Rocks on Racetrack Playa, Death Valley National Park: First Observation of Rocks in Motion. PLoS ONE 9(8): e105948. doi:10.1371/journal.pone.0105948