Chéri(e), cet été on part en Antarctique !

Dôme Concordia en Antarctique. Panneau indicateur de directions. Laurent AUGUSTIN/CNRS Photothèque.

Ils sont de plus en plus nombreux à se rêver explorateur d’un jour sur ce continent singulier, si bien que le tourisme en Antarctique se retrouve désormais au cœur d’enjeux géopolitiques, scientifiques et écologiques.

L’association internationale des voyagistes de l’Antarctique (IAATO) estimait à plus de 45 000 le nombre de touristes ayant foulé ou longé les terres antarctiques lors de la saison 2017-2018. Il y a 25 ans, ils étaient moins de 7 000. L’imaginaire des touristes et l’argumentaire des agences de voyage se nourrissent des expéditions scientifiques, récentes ou passées. Sur le site d’une de ces agences, on peut lire : « durant cette croisière en Antarctique, le bateau d’expédition navigue sur les traces glorieuses des explorateurs polaires de la fin du XIXe et du début du XXe ». Le sixième continent, dernier à avoir été découvert au XIXe siècle, est un continent dévolu à la science. Les activités touristiques se concentrent pour l’instant dans la région de la péninsule Antarctique, où sont justement installées une vingtaine de bases scientifiques, sur les 52 que compte le continent. Dans un article de 2007, les géographes Mathias Strobel et Frank Tétart voyaient dans cet afflux de touristes un enjeu géopolitique.

L’IAATO comptait parmi eux, pour la saison 2016-2017, 33 % d’Américains, 12 % de Chinois et 10 % d’Australiens. Leur présence pourrait être un moyen de légitimer d’éventuelles revendications territoriales. Les deux géographes citent également Yves Frénot, ancien directeur de l’Institut polaire français (IPEV). Celui-ci prévient que l’accroissement du tourisme peut aller jusqu’à « contraindre les scientifiques à abandonner certains sites au profit des touristes ». L’accroissement du nombre de touristes augmente mécaniquement le risque d’introduction d’espèces, de dégradation de la faune et de la flore, mais aussi d’accidents en mer pour les bateaux et les hélicoptères qui les accompagnent. Le tourisme en Antarctique se démocratise, même si les voyages les moins chers restent affichés à près de 8 000 €, jusqu’à plus de 30 000 €, pour des séjours de 15 à 30 jours.

Romain Hecquet

Image : Dôme Concordia en Antarctique. Panneau indicateur de directions.
Crédit : Laurent Augustin/CNRS Photothèque.

Référence :
« Le tourisme en Antarctique : un enjeu géopolitique ? », Hérodote, avril 2007, n° 127, pp. 167-177.