Les innombrables facettes du rire

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Dans nos communautés occidentales, le rire est souvent associé à la gaieté. Mais ses sens se multiplient bien vite lorsqu’on s’intéresse à d’autres cultures…

Chez tous les animaux – dont les humains – le rire est le résultat d’un relâchement des tensions liées au stress et traduit ainsi l’absence de danger à ceux qui l’entendent. C’est pourquoi rire en groupe serait un moyen de le souder, en lui offrant un contexte agréable. A contrario, si le rire des méchants dans les films nous glace le sang, c’est parce qu’il est émis dans des situations connotées négativement : le message transmis est erroné, ce qui nous met dans un état de malaise. Mais pas besoin d’être psychopathe pour transmettre un message brouillé ; Marilyn Monroe disait : « Si vous pouvez faire rire une fille, vous pouvez lui faire faire n’importe quoi ». C’était sans compter sur le rire nerveux, émis en réponse à une situation de stress et permettant de calmer un potentiel agresseur.

Toutefois, on le sait tous : le rire peut faire encore plus mal. D’après l’anthropologue Richard D. Alexander, l’humour n’existe que lorsqu’il s’exerce au dépend de quelqu’un d’autre. Singer une personne, tout comme ne pas rire à ses blagues, est autant un moyen de renforcer les liens entre les rieurs que de stigmatiser l’objet du rire. Face à cela, l’auto-dérision est une façon de se protéger d’éventuelles moqueries : en manifestant une distance avec soi-même et son mal-être, il paraît possible de réintégrer le groupe des moqueurs. Mais cela ne s’applique pas à toutes les cultures, entre lesquelles la fonction sociale du rire peut varier considérablement.


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Rire pour dédramatiser, un enjeu social

En visitant une tribu des Philippines, l’anthropologue Torres Mejia a constaté que dans celle-ci, le rire est un moyen d’assumer pleinement ses torts auprès de son interlocuteur : en racontant avec humour sa propre bêtise à la personne lésée, la faute paraît moins dramatique et le conflit s’en trouve désamorcé. Autre société, autre exemple : lors de ses voyages, l’anthropologue Colin Turnbull a fréquenté certaines tribus inuites et ougandaises, dans lesquelles les conditions de vie étaient difficiles. Il a remarqué que rire d’une situation compliquée était chose courante : ce serait en réalité une façon de rire de son propre mal-être afin de le rendre plus supportable.

Finalement, que vous soyez français, inuit ou encore philippin, ou tout simplement en position de séducteur, l’action de rire peut revêtir une signification différente. Montrant que, bien que le rire soit un langage universel, c’est son usage qui lui offre tout son sens.

Sylvain Roy


Sources :

Gabin, R. (2021, March 31). Le rôle social du rire. ECHOSCIENCES – Grenoble. https://www.echosciences-grenoble.fr/articles/le-role-social-du-rire

Pasqueron de Fommervault, I. (n.d.). Je ris donc je suis. Le rire et l’humour au carrefour de deux processus identitaires : socialisation et individuation [Thèse]. Université Aix-Marseille.