Villes étoilées : erreur 404

Combien d’étoiles pouvez-vous contempler dans le ciel nocturne qui vous entoure ? Quelques-unes ? Des dizaines ? Des centaines ? La pollution lumineuse tend à restreindre notre lien avec les constellations, l’Univers, et ce particulièrement en milieu urbain. Un phénomène qui ne date pas d’hier et qui n’est pas sans conséquences sur les écosystèmes.

Un tiers de l’humanité ne voit plus la Voie Lactée ! En cause ? La pollution lumineuse. Cette présence nocturne anormale ou gênante de lumière artificielle générerait un impact croissant sur la faune, la flore mais aussi nous, les humains. À l’origine constatée au XIXe siècle par les naturalistes, cette notion n’est médiatisée qu’au XXe siècle par les astronomes mondiaux, gênés dans leurs observations. Dès les années 1940, l’apparition de l’ampoule et des réseaux électriques permettent le développement des éclairages publics partout dans le monde. Un développement exalté par l’étalement urbain massif d’après-guerre. Depuis, rien ne s’est amélioré et les étoiles de notre ciel nocturne ont disparu peu à peu en milieu urbain. Comment le savons-nous ? Grâce à trois outils de mesure principaux : l’imagerie satellitaire, la mesure au sol de la luminance par photomètre et l’échelle de Bortle. À la fois utilisés par les astronomes, les écologues, les naturalistes ou même les amateurs, ces deux derniers outils contribuent à cartographier la luminosité du ciel nocturne terrestre et viennent compléter l’outil satellite très performant de la NASA. Ainsi, le premier atlas mondial basé sur l’imagerie satellitale des années 1996-1997 est paru en 2001. 

Atlas de la lumière artificielle dans le ciel – ©Jurij Stare, http://www.lightpollutionmap.info
Les zones rouges et jaunes sont les plus lumineuses

Une pollution peu évidente aux impacts bien réels

Les usages inutiles d’éclairage sont la raison principale de la pollution. Le mauvais positionnement de luminaires, le choix esthétique ou l’éclairage surpuissant sont des sources (trop) importantes de lumière. De fait, celle-ci se retrouve perdue ou réfléchie dans le ciel. Le changement du spectre des sources lumineuses est également pointé du doigt par les scientifiques avec l’arrivée des lampes à LED (émettant dans le bleu et l’ultraviolet) dans l’éclairage public, véritable piège écologique pour les insectes nocturnes, mais pas seulement… En réalité, la majorité des animaux sont nocturnes et l’impact de cette pollution est sous-estimé : perturbations du système proie-prédateur, des cycles de reproduction et des migrations ou de la photosynthèse des végétaux. Bien au-delà de la sphère écologique, c’est un réel gaspillage énergétique, des coûts sanitaires et économiques considérables ! Pourtant, des solutions sont d’ores et déjà entre nos mains : limiter l’éclairage de nouvelles zones, sa durée ou son intensité à certaines heures de la nuit, l’éclairage à la demande ou la signalisation rétro-réfléchissante sur les routes. Il ne tient donc qu’à nous de retisser ce lien avec notre ciel étoilé et de lutter contre ce phénomène bel et bien réversible ! Le label desRéserves Internationales de Ciel Étoilé de l’International Dark-Sky Association fait un premier pas depuis 1999 en créant, dans le monde, des zones protégées de la pollution lumineuse. On en compte aujourd’hui deux en France : le Parc national des Cévennes et le Pic du Midi de Bigorre.

Corentin Mathé — Deletang