Le nom de Kepler peut évoquer des souvenirs douloureux. Cours de physique interminables, formules indigestes et lois incompréhensibles, ce personnage semble moyennement attrayant. Et pourtant, il se révèle plein de surprises, que le temps et des années de recherche ont petit à petit éclipsé pour ne garder en mémoire que trois lois.

Johannes Kepler (1571-1630) était à la fois un astronome et l’astrologue personnel du roi du Danemark. L’astronomie n’était donc dans ses recherches pas une fin en soi, mais plutôt un outil afin d’effectuer des prédictions astrologiques toujours plus précises. Ainsi, les lois de Kepler et leurs justifications n’avaient pas du tout le même sens à son époque.

Kepler part du postulat qu’un dieu créateur « Très bon et très grand » a calibré sa création afin qu’elle soit la plus parfaite et harmonieuse possible. Il cherche à découvrir les lois mathématiques qui régissent L’harmonie du monde, afin de saisir l’ensemble des rapports qui unissaient le ciel et la Terre. Cette recherche a donné naissance à de nombreuses lois qu’il expose dans le cinquième tome de son ouvrage Harmonices Mundi. Il y traduit sous la forme de musique l’harmonie du déplacement des planètes à l’aide de rapports mathématiques.

Kepler associe un thème musical (ensemble de notes) à chacune des six planètes connues à son époque (dans l’ordre depuis le Soleil : Mercure, Vénus, la Terre, Mars, Jupiter et Saturne). Ces notes représentent la variation de la vitesse angulaire apparente des planètes autour de leurs orbites. Les planètes les plus lentes seront associées aux notes les plus graves et les plus rapides à des notes plus aiguës. À l’aide de divers calculs, il associe une fréquence sonore à la vitesse angulaire de chaque planète. Cette fréquence glisse entre sa limite minimale et sa limite maximale lorsque la vitesse angulaire de la planète autour du Soleil varie. Quand la planète parcourt son orbite elliptique on observe un glissement, un changement continu de fréquence du grave (aphélie) vers l’aigu (périhélie), puis de l’aigu vers le grave.

Le son de chaque planète est donc continu, ce qui rend sa modélisation à l’aide d’instruments à cordes impossible. Kepler tentera donc de traduire cette musique à l’aide de différentes notes.

Ainsi, lorsqu’on considère les six planètes, on obtient une partition à six voix. Certes, le résultat peut paraître dissonant à nos oreilles humaines pour plusieurs raisons (notamment un tempo très lent et différent en fonction des planètes), cependant est-ce réellement important ? Après tout, cette musique n’est-elle pas spécifiquement adressée au Soleil ? Seul lui peut donc juger de la dissonance de l’oeuvre des planètes…

Au fil de l’article, nous avons recensé les compositions provenant de chacune des 6 planètes en question. Amateur de musique interstellaire, à vos casques !
Sybille Buloup
Sources :
Lombardi, A. M. (2003). Kepler : Le musicien du ciel. Belin-« Pour la science ».
Simon, G. (1992). Kepler, astronome, astrologue. Gallimard.
Merci à Joachim Taïeb pour la musique!