Au cours du dernier siècle, le 7ème art a subi une refonte totale de sa définition de la folie. Si dans les années 1920 le fou était une caricature du monstre, du sadique ou du serial killer, celui-ci tend à s’humaniser dans les années 1940 et devient un personnage énigmatique au lourd bagage personnel. Dans cette période charnière, Hitchcock est notamment l’un des premiers à s’intéresser à la psychologie de ses personnages.
Cette évolution est le reflet du changement de perception qui s’opère à cette époque. De M le Maudit (1931) à Psychose (1960), le film d’horreur est remplacé par le thriller psychologique. Le fou n’est plus un monstre mais un malade, il n’est plus le tueur mais la victime. Le balafré pointé du doigt devient un homme parmi les hommes.
Ce n’est qu’à partir des années 1970 que le cinéma cherche à comprendre et à expliquer la folie. On montre les traumatismes, on met l’accent sur l’environnement social du personnage. On se surprend parfois à s’identifier à sa situation. Aujourd’hui, la folie devient non seulement un sujet récurrent, mais également une manière de dénoncer les situations aberrantes du monde actuel.
Jeanne Bourdier






Derrière la caméra
Mettre en scène le dérèglement de la raison : que montrer, et comment le montrer ? La première option, la plus efficace et la plus employée par les cinéastes de renom, est la distorsion de l’image : utiliser le grand angle pour déformer les perspectives et donner une impression très dérangeante de proximité, désaxer la caméra pour créer un sentiment d’instabilité (c’est l’angle néerlandais) ou encore employer des effets épileptiques comme les inserts frénétiques pour faire ressortir l’aliénation. L’autre grande dimension à maîtriser – et modifier – est le temps. La clé pour le ralentir : s’attarder sur des personnages secondaires ou une scène banale, jouer sur le temps évoqué insinuant que la situation dure depuis très (trop) longtemps…
Mathilde Ruby