L’alcool est bien ancré dans notre culture. Nous buvons en soirée, aux anniversaires, aux fêtes de fin d’année, le soir pour se détendre, en mangeant, avant le repas, après le repas… Pourquoi est-il mal vu de fumer cigarette sur cigarette mais pas d’enchaîner les verres ? Banalisé, l’alcool est à la fois fortement addictif et mortel. D’après l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), 10 % des adultes en France sont en difficulté avec l’alcool. 15 000 décès de cancer et 12 000 morts de maladies cardio-vasculaires sont imputables à l’alcool. Chez les femmes, un verre quotidien augmenterait de 5 % le risque de cancer du sein. Les recommandations des autorités de santé pour limiter l’impact de l’alcool : pas plus de deux verres par jour, pas tous les jours et pas plus de quatre verres par occasion. Le mieux reste de ne pas boire, car même une consommation considérée comme modérée (1,3 verre par jour) serait responsable de 1 100 morts par an en France.
La cigarette et l’alcool sont les deux premières causes de mortalité évitables. C’est le but du #DryJanuary, né en 2003 en Grande-Bretagne. Pourquoi buvez-vous ? Le Dry January permet de redéfinir sa consommation, de se rendre compte d’une addiction ou juste de se sentir mieux pendant un mois en arrêtant de boire en janvier. D’ailleurs, arrêter l’alcool pendant un mois a de nombreux avantages. Une étude menée par l’université de Sussex sur 800 personnes ayant participé au Dry January 2018 en a recensé les bienfaits ressentis. Les participants ont révélé pour la moitié avoir une peau plus saine, lumineuse et perdu du poids. 70 % ont mieux dormi, étaient plus énergiques. 88 % des participants ont économisé de l’argent. Et ce ne sont que les bénéfices d’un arrêt à court terme ! Les chercheurs ont aussi remarqué que même celles et ceux qui n’avaient pas réussi à s’abstenir mais avaient bien diminué leur consommation d’alcool ont ressenti ces effets positifs. Vous avez envie d’être en meilleure santé mais vous n’avez pas eu le temps de faire le Dry January ? Il y a d’autres mois dans l’année. Et si vous ne vous sentez pas de le réaliser seul.e, l’an prochain, participez avec vos proches au défi de janvier !

“Pour quelques soirées d’ivresse”
Erwan Gramand a publié sa biographie en auto-édition « Un détour par l’enfer ». Il y raconte ses 25 années d’alcoolisme.
Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire votre livre ?
J’ai écrit ce livre après mon déclic, celui qui sonne la fin de la consommation d’alcool et le début d’une nouvelle vie dans l’abstinence. Dans mon livre, je raconte mon parcours, ce qui se passait dans ma tête, l’agressivité, les effets dépressogènes, les impacts chaotiques sur ma vie de famille, et surtout les mensonges qui me permettaient de boire en cachette. Parler d’alcoolisme est tabou en France. Ce livre est destiné aux malades alcooliques qui pensent être seuls, à leur famille et au grand public qui croit encore que l’alcoolisme est un vice.
Que pensez-vous des initiatives de sensibilisation comme le Dry January ?
C’est une superbe initiative qui va dans le sens de la santé publique et alerte sur les dangers de l’alcool. C’est l’occasion de faire un point sur sa consommation. Cela peut aussi permettre de réaliser la présence d’une addiction. Prenons le cas d’une personne qui n’estime pas avoir une consommation problématique. Si au bout de quelques jours sans alcool, elle vit un syndrome de sevrage, elle peut alors entamer les démarches pour se faire aider. Il est scandaleux que le gouvernement ait refusé de soutenir le Dry January. Les dirigeants sont censés protéger le peuple. Il y a cette ambigüité en France sur le vin. Il fait partie du patrimoine culturel mais il reste un alcool comme un autre, tout aussi dangereux.
À votre avis, quelles mesures devraient être mises en place par le gouvernement pour mieux encadrer la consommation d’alcool ?
Il faudrait interdire les publicités pour les bières fortes et taxer plus fortement ce produit. Elles sont un vrai danger pour la santé qui m’ont personnellement beaucoup coûté : j’ai connu d’inquiétant trous de mémoire en les consommant. Il y a un fort travail d’éducation et de prévention à réaliser, notamment auprès des adolescents. Ce sont quelques pistes que j’ai proposées à la députée de mon département en lui envoyant mon livre.
Pensez-vous qu’il y ait un souci sociétal en France avec la consommation d’alcool ?
Il est mal vu de dire non à un verre. À plusieurs reprises, j’ai tenté d’arrêter. Les invitations à dîner n’ont pas aidé, il fallait toujours une excuse. Je tirais au sort dans ma liste : « je suis sous antibiotiques », « j’ai un marathon la semaine prochaine » etc. L’accès à l’alcool est facile. Les supérettes ouvertes jour et nuit, les soirées open-bar… Les jeunes doivent en connaître les dangers. Moi, pour quelques soirées d’ivresse, j’en ai pris pour 25 ans.
Agathe Delepaut