Demain, tous à l’eau

Crédits : Tiphaine Claveau et Marlène Mezache

De nombreuses villes côtières sont menacées par la montée des océans, et des projets d’une architecture nouvelle apparaissent : ce sont les villes marines. Images d’une nouvelle cité pour demain, ou rêve utopique ? Les architectes des projets tels que Lilypad ou SeaOrbiter ont en tout cas bien l’intention de se jeter à l’eau.

Nilan était installée sur le canapé, obnubilée par l’enveloppe qu’elle tenait entre ses mains. Anxieuse, elle jouait mécaniquement avec les coins, hésitant à l’ouvrir. Les temps étaient difficiles depuis que le crédit carbone avait remplacé les anciennes monnaies, mais Nilan était plutôt bien lotie. Elle s’occupait de la conservation des espèces marines dans un laboratoire sur la côte. Pourtant, elle se retrouvait régulièrement à cours de crédit carbone. Mais elle tenait entre ses mains un élément qui pouvait tout changer : la réponse du ministère des migrations. De plus en plus de villes marines avaient été construites ces dernières années, mais seuls quelques chanceux y trouvaient une place. Nilan retint son souffle, et tira sur la petite ficelle qui ouvrit l’enveloppe. Elle sortit les pages délicatement, et un soupir de soulagement se dégagea lorsqu’elle aperçut le tampon vert en bas de page : « admis ». La tour principale était la première chose que Nilan aperçut du bateau. Elle était ondulée comme les vagues, et le contraste des panneaux solaires scintillants contre les plateformes végétalisées dressait un tableau harmonieux. Autour de la structure principale se dessinait des habitations, des potagers, mais aussi des théâtres, des écoles, tout le nécessaire d’une vie confortable. Un homme d’une cinquantaine d’années, aux cheveux grisonnants, s’était proposé pour lui faire le tour de la ville et l’attendait sur le ponton. Il s’appelait Gabriel et était responsable des grands marais, le système de traitement des eaux usées par les micro-algues. Il lui donna toutes les informations nécessaires pour s’intégrer facilement. Elle apprit qu’AquaVita offrait trois possibilités de déplacement : la marche, le vélo ou la barque. L’eau de mer était dessalée et l’eau de pluie stockée pour fournir l’eau douce. Les déchets, eux, étaient transportés par des tubes vers les grands marais ou le compost. Il n’y avait aucune dépendance au monde extérieur, Aquavita était une ville autosuffisante. L’ensemble du parc énergétique reposait sur les énergies renouvelables, le solaire en partie, mais également des éoliennes, la biomasse, par phyto-épuration ou grâce à l’hydraulique. Gabriel s’excusa un instant dans ses explications pour répondre à un appel urgent, et revint quelques secondes plus tard, angoissé. « C’était le laboratoire, c’est une catastrophe ! Un Octopus géant a été aperçu rôdant autour du labo. Il aurait attaqué un des vaisseaux d’exploration et provoqué une fuite lorsque le vaisseau tentait de rentrer. A partir d’aujourd’hui, vous êtes la responsable des espèces marines. Venez ! Nous devons y aller au plus vite ».

Tiphaine Claveau