En 2017, le prix Nobel de physiologie et de médecine est attribué pour la découverte des mécanismes moléculaires qui règlent le rythme circadien. Que se cache-t-il derrière cette intrigante appellation ?
Prendre la mouche
Notre corps est réglé comme une horloge, sur un cycle de 24 h calqué sur l’alternance jour/nuit. Notre production d’hormone, notre température corporelle ou encore notre rythme cardiaque évoluent le long de la journée, et ces variations restent les mêmes, jour après jour. Le rythme circadien, en fait, c’est le nom donné à ces processus physiologiques qui suivent une cadence journalière.
Sa découverte remonte aux années 70, grâce à des insectes. Plus précisément, des drosophiles : petites mouches de 3 à 4 mm de long, faciles à élever en laboratoire. Ronald Konopka, un étudiant en thèse de génétique sous la supervision de Seymour Benzer, étudie le rythme de vie de ces mouches. Il remarque qu’après la modification d’un certain gène, les mouches mutantes adoptent un cycle de vie plus court (19 h) ou bien plus long (29 h). L’analyse plus poussée de l’ADN de ces mouches permettra plus tard de découvrir le mécanisme cellulaire à la base du cycle circadien. Ce processus fonctionne avec un système de rétro-action cyclique, que l’on retrouve aussi bien chez les mouches que chez les humains.
Mise en lumière
Chez l’humain, notre horloge interne est dissimulée dans les noyaux suprachiasmatiques. Ce sont des régions de notre cerveau qui communiquent le rythme circadien aux autres zones du cerveau et, par conséquent, à tous nos organes.
Cette véritable horloge biologique est mise à l’heure par des indices qui permettent de la synchroniser sur notre environnement. Ces indices qui nous permettent de ne pas être déconnectés avec notre monde sont appelés Zeitgebers (« donneurs de temps » en allemand), le plus fort d’entre eux étant la lumière.
Nous possédons en effet dans notre œil des cellules sensibles à la lumière bleue qui communiquent avec notre cerveau. Il comprend alors s’il fait jour ou nuit. Une exposition anormale à la lumière bleue, par exemple à cause des écrans, peut alors désynchroniser notre rythme circadien.
Aujourd’hui, notre connaissance du rythme circadien est utilisée pour soigner le cancer. Les cellules cancéreuses présentent en effet la particularité d’être totalement déconnectées du rythme circadien de notre corps. Les biologistes et les médecins ont alors calculé à quel moment de la journée il serait opportun de délivrer la chimiothérapie afin qu’elle ait le moins d’effet sur les cellules saines qui, elles, sont toutes synchronisées. Pensez donc à remercier nos amies les mouches au lieu de vouloir les écraser !
Baptiste Gaborieau