Forêts en apnée

Sous l’eau, les forêts de kelp représentent une source inaltérable de biodiversité. Algues brunes géantes, elles abritent et nourrissent des centaines d’espèces différentes, qu’elles soient marines, terrestres ou même aériennes. Mais l’avenir de cet écosystème semble compromis par la pression des facteurs climatiques et humains actuels.

La forêt peut aussi se développer sous l’eau ! Et oui, pas nécessairement besoin d’arbres robustes dressés vers le ciel pour représenter cet écosystème imposant et doté d’une riche biodiversité. En particulier, le kelp désigne un ensemble d’espèces différentes d’algues brunes extrêmement longues et dont le regroupement forme de gigantesques labyrinthes sous-marins. Mieux, ces forêts de kelp géant sont régulièrement comparées par les spécialistes à l’équivalent marin de l’Amazonie, rien que ça !

« La destruction de cette flore serait annonciatrice d’un destin bien funeste »

Avec une croissance plus rapide que le bambou, les lianes de kelp peuvent facilement atteindre 60m de haut. Et parmi ces longs végétaux gracieux et ondoyants, c’est tout un écosystème qui se maintient en équilibre. Depuis les crustacés au sol, jusqu’aux mammifères marins au niveau de la canopée en passant par les innombrables poissons, la destruction de cette gigantesque flore aquatique serait annonciatrice d’un destin bien funeste pour la faune abritée… Mais pas seulement  ! Car en tout, ce sont 750 espèces qui seraient dépendantes de la survie du kelp. Pour les oiseaux marins qui viennent picorer les algues échouées, pour les poissons plus éloignés qui se nourrissent des algues détachées, la symbiose instaurée sous la surface de l’eau respecte un cycle fabuleusement profitable à la pérennité de nos océans. Pourtant, c’est précisément un déclin de ces forêts sous-marines qui est actuellement observé par les chercheurs.
Avec le réchauffement climatique en première ligne, la pression humaine comme la surpêche en prime, les écosystèmes contenus dans les forêts de kelp semblent aujourd’hui en péril. Dans une étude parue en 2016 dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), les auteurs indiquent que 38% des régions du monde observées subissent un recul significatif de leurs forêts de kelp lors des 50 dernières années… Les milliers de clichés réalisés par le satellite Landsat depuis près d’un demi-siècle nous informent en effet de l’évolution rapide que connaissent ces écosystèmes fragiles, premières victimes des évolutions contemporaines du globe.

Pierre-Yves Lerayer