La personnalité fait l’objet de nombreuses spéculations. Aujourd’hui, c’est même un classique des tests Facebook. Mais peut-on réellement la mesurer ? Et si oui, comment ? Hippocrate, au IVe siècle avant J.-C., pensait déjà que la personnalité dépendait de facteurs organiques. Cependant, ses hypothèses ont longtemps été oubliées, car la pensée dominante définissait la personnalité comme un concept philosophique et non physique.
L’étude de la personnalité doit beaucoup à un questionnaire psychologique développé par des chercheurs : le Big Five. Ce questionnaire porte sur cinq aspects : l’ouverture d’esprit (créativité, curiosité), le caractère consciencieux, l’extraversion, l’amabilité et la tendance aux émotions négatives. Selon ses réponses au questionnaire, chaque personne se situe donc sur un point du continuum formé par chacun des cinq axes de personnalité. Ce formulaire a été testé à maintes reprises et les résultats obtenus pour chaque personne ont le mérite d’être durables. Si vous remplissez ce questionnaire plusieurs fois dans votre vie, vous devriez donc obtenir des résultats similaires.
À quoi sert de mesurer la personnalité ?
Le Big Five présente l’avantage considérable de prédire nos comportements – dans une certaine mesure bien sûr. Selon le score de chacun sur chaque trait de personnalité, on peut prévoir des différences entre les habitudes quotidiennes, ainsi qu’entre les réactions des gens face à un même événement. Par exemple, un introverti sera plus enclin qu’un extraverti à communiquer par email ; une personne très aimable sera plus susceptible d’aider son voisin à déplacer son canapé qu’une personne peu aimable, qui laissera son voisin déplacer son canapé tout seul en le regardant fixement à travers ses persiennes semi-ouvertes. D’autres questionnaires de personnalité existent, mais le Big Five a été largement adopté par la communauté scientifique, grâce à la durabilité de ses résultats et son caractère prédictif.

L’histoire du cheminot Phineas Gage
En 1848, le lien entre cerveau et personnalité est illustré par un incident ferroviaire. Phineas Gage posait des rails dans le New Hampshire en sifflotant lorsqu’une tige de fer lui traversa le crâne. Bien qu’affaibli, Phineas survécut. Cependant, suite à l’incident, sa personnalité changea : d’un naturel calme et courtois, il devint impulsif et vulgaire. Ce cas est le premier à établir concrètement l’influence du corps sur la personnalité. Aujourd’hui, l’idée d’interaction entre corps et esprit est la base sur laquelle reposent les travaux de sciences cognitives sur la personnalité humaine.
Comment expliquer ces variations de personnalité ?
Les chercheurs mènent ce que l’on appelle des Twin Studies, des études basées sur le principe de l’héritabilité. Ils étudient les traits de personnalité de jumeaux qui ont grandi dans des familles différentes. Leurs gènes sont identiques, seuls leurs environnements familial et social sont différents. Les différences de personnalité mesurées (grâce au Big Five par exemple) reflètent donc les différences d’environnement dans lesquels ils ont vécu.
Grâce aux Twin Studies, les chercheurs ont montré que les traits de personnalité sont en moyenne héritables à 40 %. Cela signifie que 40 % de votre tempérament extraverti s’expliquent par vos gènes, tandis que 60% seraient dus à des facteurs extérieurs. L’héritabilité des traits psychologiques est cependant moins élevée que celle de la plupart des traits physiques. Ainsi, notre personnalité est ancrée dans une réalité physique, mais est aussi le fruit de l’interaction continue entre gènes et environnement extérieur.
Lena Coutrot
Héritabilité
C’est la probabilité que les gènes d’une personne (et non son environnement) soient responsables du développement d’une caractéristique physique ou psychologique. Exemples : La couleur des yeux est hautement héritable, car principalement codée par les gènes. Le bronzage est peu héritable, car fortement déterminé par l’environnement, bien que la capacité à bronzer soit codée génétiquement.