Le paradoxe américain

Quand on évoque le pays de l’oncle Sam, on a souvent à l’esprit l’image d’une nation pudibonde, où la religion aurait fixée des règles qui, vu d’Europe peuvent parfois nous sembler étrange. Pourtant, derrière l’image d’Epinal se cacherait une réalité plus complexe.

Souvent perçue comme traditionaliste et peu libérée, la société étasunienne passe pourtant sur certains points pour progressiste. Une nation où le culte de l’individualité aurait permis à ses habitants à une grande liberté dans l’affirmation de leur identité propre.
Pour Anne Crémieux, maîtresse de conférences à l’Université Paris X (Nanterre), ces deux points de vue ne seraient pas contradictoires. Selon, elle, l’un des traits caractéristique de la société étasunienne serait même cette coexistence entre des groupes aux valeurs parfois très différentes.

Anne Crémieux insiste sur l’importance des évolutions sociales qui se sont produites ces dernières décennies à travers le pays. « Ils ont des années d’avance » déclare-t-elle. Aujourd’hui, il ne serait, par exemple, plus si rare, notamment dans les grandes villes, de rencontrer des personnes – y compris cisgenres – préférant l’utilisation du neutre pour les définir. De plus, l’acceptation de groupes comme les homosexuels et les transgenres serait maintenant chose évidente dans de nombreux endroits.

Pourtant, dans une nation fondée par une élite largement puritaine, certains usages sont encore bien ancrés. Le contact physique est ainsi fort peu apprécié. La différence serait même dépaysante pour un français qui viendrait d’arriver outre-Atlantique. Qui n’a jamais, par exemple, été frappé dans une série ou un film par un personnage demandant à un autre, l’air gêné, l’autorisation de l’embrasser ou même de le toucher. Dans la réalité également, l’Antioch College a été la première université à interdire dans son règlement, tous contacts physiques non consentis. C’était en 1991 et désormais, de nombreuses universités lui ont emboîté le pas.
En définitive, dans un pays constitué d’un fantastique mélange culturel, l’imaginaire sexuel et la relation que les américains entretiennent avec leur corps est, en réalité, indéfinissable. Il serait plutôt comparable un gigantesque patchwork dans lequel il serait impossible de définir une couleur dominante ou un motif répété. Pour reprendre les mots d’Anne Crémieux : « S’il-y-a une couleur, c’est le mélange de toutes les autres »

Guénolé Carré